RACCONTO LA STORIA

PADRE PIO, PRETRE SAINT: EUCHARISTIE ET RECONCILIATION

                          Par fr. ANTONIO BELPIEDE OFM CAP

 

 

ABIDJAN – COTE D’IVOIRE

 

1er May 2010

 

 

Trois Papes, désormais, ont eu la possibilité d’exprimer leur  magistère sur Padre Pio : Jean Paul II, qui a eu le mérite d’avoir décrété sa sainteté au nom de l’Eglise, Benoît XVI, envers qui exprimons notre reconnaissance, il est notre pasteur suprême, successeur de Pierre, et  Paul VI. Ce dernier, est le Pape qui a donné à Padre Pio de vivre ses dernières années gardé par l’amour de la Mère Eglise, en toute sérénité. Un peu plus de deux ans après sa mort, ce Pape disait aux Supérieurs Généraux de l’Ordre des Frères Mineurs Capucins :

 

« Il se produira pour vous le même miracle que pour padre Pio. Voyez quelle réputation il a eue ! Quelle clientèle mondiale il a rassemblée autour de lui ! Pourquoi ? Etait – il un philosophe ? Etait – il un savant ? Parce qu’il avait des moyens à disposition ? Parce qu’il disait la Messe humblement, confessait du matin au soir et était, difficile à dire, le représentant de notre Seigneur marqué de ses stigmates. C’était un homme de prière et de souffrance ». ( cit. en Hommage,  5)

 

Avec la synthèse et la finesse que lui étaient propres le grand Pape avait déjà saisies les fondements essentiels de la sainteté de padre Pio, les mêmes que mes frères capucins de Côte d’Ivoire ont voulu me proposer pour ces deux conversations avec vous.

 

Ces fondements étaient déjà dans le cœur du jeune fra Pio la veille de son ordination sacerdotale, 10 août 1910. Sur le souvenir il écrivait :

« O rex, dona mihi animam meam pro qua rogo et populum meum pro qua obsecro (Est. 7,3) [O roi, accorde-moi la vie, voilà ma demande, et la vie de mon peuple, voilà mon désir]. Souvenir de ma première messe.

Jésus, mon souffle et ma vie,

aujourd’hui en tremblant

je t’élève

dans un mystère d’amour,

qu’avec toi je sois dans le monde

Voie, Vérité, Vie,

et pour toi prêtre saint, victime parfaite »

(cit. Bouflet, 115)

 

Après son ordination le mystère de sa vie s’est déroulé à travers la vie sacramentelle comme ministre de l’autel et de la réconciliation et, en même temps, à travers un singulier chemin de croix qui l’a enfin conduit à être, comme Jésus, prêtre et victime : victime parfaite sur l’autel de la croix.

 

Voilà donc ses deux coordonnées.

Premièrement : La sainteté de Padre Pio est fondée sur son sacerdoce. Il a vécu comme un humble prêtre qui prolonge dans les temps le sacrifice que le Christ a fait de lui-même. Eucharistie et sacrement de la Pénitence ont constitué les deux piliers de son travail quotidien pour sauver les hommes. Il a été un homme de prière. Toute sa vie, comme celle de St. François, était devenue une prière, un acte prolongé et constant de sanctification de son peuple.

 

Deuxièmement : La sainteté de Padre Pio est fondée aussi sur le sacrifice qu’il a fait de lui-même. Chaque prêtre est appelé à offrir sa propre vie, son cœur, son corps en union avec Jésus. Mais padre Pio l’a fait d’une manière unique. Dieu nous a donné son sceau pour dire à l’Eglise et aux siècles que viendront qu’Il a voulu associer d’une façon visible l’offrande de ce prêtre franciscain capucin à celle de son Fils. Les stigmates et autres signes mystiques sont une évidence de la présence de Dieu dans son serviteur fidèle. C’est pour cela que Paul VI, le premier, a voulu remercier le Seigneur. Padre Pio était un homme de souffrance. Toute sa vie était devenue une souffrance qui s’amorçait chaque jour pendant la célébration de l’eucharistie et recommençait le lendemain au même autel ; offrant parmi les mains blessées les histoires de vie de milliers de gens, histoires de souffrance et de joie, de péché et de grâce, pour redémarrer après avoir, encore une foi, offert sa vie, son sang, en union totale à Jésus.

 

Le Pape Paul VI disait ces mots aux frères de padre Pio, aux frères capucins, comme lui (Padre Pio) appartenant à l’Ordre de Saint François. Ce n’est pas un hasard. Pour comprendre cet homme saint, constitué de prière et souffrance, il faut le regarder dans le charisme donné à notre fondateur, notre Patriarche Séraphique Saint François : c’est sur la montagne de la Verne, en 1224, que commence l’histoire du seul prêtre stigmatisé dans l’histoire de l’Eglise. Enfin c’est  entre les mains laborieuses de François et de Claire assistant, lavant, soignant les lépreux que commence l’histoire d’amour constituée par le Grand Hôpital bâti par  Padre Pio pour soulager les souffrances.

 

Tout en suivant la suggestion de Paul VI nous allons regarder le Padre Pio qui célèbre l’eucharistie et donne la réconciliation. Dans la 2ème conférence nous nous arrêterons sur sa participation à la passion du Seigneur, participation qui a fait de ce prêtre saint une victime parfaite en suivant Jésus.

 

PADRE PIO ET LA CELEBRATION DE LA MESSE

 

« Il disait la Messe humblement »

 

A la veille de son deuxième   anniversaire d’ordination sacerdotale, le jeun Padre Pio, malade à Pietrelcina, écrivait au Père Agostino :

 

«Je sens, mon père, que finalement l’amour me vaincra : l’âme court le risque de se détacher du corps car elle ne peut suffisamment aimer Jésus sur terre. Oui, mon âme est blessée d’amour pour Jésus ; je suis malade d’amour ; j’éprouve continuellement la douleur amère  de ce feu qui brûle et ne consume pas. […]

Mais, mon père, ou va ma pensée pendent que je vous écris ? Au beau jour de mon ordination. Demain, fête de Saint Laurent, est aussi le jour de ma fête. J’ai déjà commencé à éprouver à nouveau la joie de ce saint jour pour moi. Depuis ce matin j’ai commencé à goûter le Paradis. Que sera – ce quand nous le goûterons éternellement ?

Je compare la paix du cœur que j’ai éprouvée ce jour – là à celle que j’ai commencé à éprouver depuis la veille et n’y trouve rien de différent.

Le jour de Saint Laurent fut le jour où je sentis mon cœur plus enflammé d’amour pour Jésus. Comme j’étais heureux, comme je me réjouissais ce jour – là ».

(Ep I, 197, trad. Hommage,  13).

 

Il y a une belle phrase utilisée dans le passé en plusieurs sacristies pour aider les prêtres à se préparer à la célébration : « Seigneur, que cette messe soit pour mois comme là première, comme la dernière, comme la seule ! ». Padre Pio sentait dans son cœur ces sentiments. Il parle de la Messe comme un acte unique. Il sent la même joie de son ordination. L’ancien concept  du « mémorial » d’Israël, d’où découle la liturgie chrétienne, est présent dans le cœur du jeune Padre Pio. La première Messe est là présente, la Messe de tous les jours est une seule Messe, une seule joie, car elle n’est que la « représentation efficace » du seul sacrifice du Seigneur Jésus. C’est Lui qui nous a donné le commandement : « Vous ferez cela en mémoire de moi » (1 Co 11, 25). Et autour de cette représentation sacramentelle, mémorial du dîner de Jésus et de son sacrifice sur la croix, l’Eglise se manifeste comme « assemblée convoquée », ek – klesia, du grec « Ek kaleo ». Dans ce repas partagé par tous les fidèles sous la présidence du prêtre, on goûte déjà le Paradis, comme Padre Pio l’a dit. On ajoute qu’il y a aussi dans son beau langage un symbole de l’Ancien Testament : « Le feu qui brûle et ne consume pas ! ». On a ici l’image de la buisson ardente de Moïse. Dieu parlait à Moïse en lui indiquant sa mission de libérer Israël du Pharaon. De l’autel le Seigneur parle à Padre Pio et le pousse vers sa mission qui est de libérer ses frères des péchés à travers ce sacrifice, à travers sa vie, qui devient jour après jour toute une offrande, toute une eucharistie.

 

Le grand disciple de P. Pio, le frère Gerardo Di Flumeri disait : « Les fidèles qui assistèrent à sa Messe n’oublieront jamais son expression d’indicible souffrance et de ravissement extatique. Ils pouvaient entrevoir son intense participation au sacrifice de Jésus » (Hommage, 10). Et encore le père Alessandro de Ripabottoni nous explique : « Sa Messe, célébrée d’une manière incomparable, attirait l’attention et avait une incidence sur la dévotion de ceux qui étaient présents » (De Ripa,  95).

Nous que n’avons pas eu la chance d’y être, ferons mieux à laisser parler le même p. Pio.  Chaque jour il se levait très tôt pour se préparer bien à la rencontre avec Jésus .  Il écrivait au père Benedetto le 1911 :

 

« Mais ce qui me frappe le plus, mon père, c’est la pensée de Jésus-hostie. Le cœur se sent comme attiré par une force supérieure avant de s’unir à Lui le matin par la Communion. J’ai une telle faim et une telle soif avant de le recevoir que peu s’en manque que je meure d’anxiété, et c’est justement parce que je ne peux pas ne pas m’unir à Lui, que parfois, avec la fièvre, je suis obligé d’aller me nourrir de sa chair.

Et cette faim et cette soif au lieu d’être satisfaites après L’avoir reçu augmentent toujours davantage ». (Ep. I, 217, trad. Hommage, 16).

 

Dans son homélie pour l’inauguration de l’année sacerdotale, le 19 juin 2009, le Saint Père Benoît XVI prononçait une phrase du Catéchisme de l’Eglise Catholique : « Le sacerdoce et l’amour du cœur de Jésus » (n. 1589), et demandait au Seigneur : « […] Qu’il enflamme le cœur de chaque prêtre de cette charité pastorale capable d’assimiler son moi personnel à celui de Jésus prêtre, de manière à pouvoir l’imiter dans l’auto-donation la plus complète ».

Cette « assimilation » en Padre Pio a été extraordinaire. Les phénomènes mystiques les plus remarquables en lui, comme le don des larmes, les touches substantielles, la fusion des cœurs, apparaissaient pendent la célébration de la Messe ou tout de suite.

Il était obligé par « sainte obéissance » à dire au père spirituel ce qui lui passait, avec tous les détails. Dans une lettre du 18 avril 1912 au père Agostino il confesse la fusion de son cœur avec le cœur de Jésus :

 

« J’ai pu avec peine me rendre chez le Divin Prisonnier pour célébrer. La Messe terminée, je m’entretins avec Jésus pour l’action de grâces. Oh, comme il fut doux ce matin le colloque avec le Paradis ! … Le cœur de Jésus et le mien, permettez l’expression, se mêlèrent. Ce n’étaient plus deux cœurs qui battaient, mais un seul. Le mien avait disparut, telle une goutte d’eau dans la mer ».  (Ep I, 273, trad. Hommage, 16).

 

Il était exactement par cette perte de soi en Jésus eucharistie que  Padre Pio recevait le Seigneur dans son cœur, que le Seigneur saisissait son cœur, l’envahissait. Et dans le visage du prêtre Padre Pio il était facile et doux de voir le visage du Christ qui donne sa vie pour l’humanité, le Christ, prêtre de la Nouvelle Alliance célébrée  dans son corps et son sang.

Enfin ce que nous tous devrions apprendre du Padre Pio serait le désir de l’eucharistie. Les mots sont faibles pour  décrire ce que seule une véritable expérience peut expliquer, au de-là de tout langage. Nous tous formons l’Eglise, qui est l’épouse du Christ Seigneur. Ce cœur se montre très clairement en Padre Pio :

 

« Que la douce pensée d’aimer Jésus et d’être encore davantage aimé de Lui vous console, mon chère père. Avec l’épouse des Cantiques demandons Lui la grâce : ‘Qu’il me donne le baiser de sa bouche ! Oui, tes amours sont meilleurs que le vin !’. Que de fois ce baiser de paix ne nous est il pas donné par Jésus, surtout à nous prêtres, par le très Saint Sacrement ! Oui, désirons-le ardemment ce baiser de la bouche divine, et plus encore soyons-en reconnaissants. Quel plus grand don pouvons-nous désirer de Dieu, nous misérables mortels ? ». (Ep I, 406, trad. Hommage, 16).

 

 

 

 

 

 

PADRE PIO ET LE SACREMENT DE LA PENITENCE

 

« Il confessait du matin au soir »

 

A San Giovanni Rotondo, dans l’homélie du 21 juin 2009, le Saint Père disait :

 

« Telle était toujours sa première préoccupation, son inquiétude sacerdotale et paternelle : que les personnes reviennent à Dieu, qu’elles puissent faire l’expérience de sa miséricorde et, intérieurement renouvelées, puissent redécouvrir la beauté et la joie d’être chrétiens, de vivre en communion avec Jésus, d’appartenir à son Eglise et de pratiquer l’Evangile ».

 

Peu après le nouvel archevêque de Manfredonia – Vieste – San Giovanni Rotondo, Mons. Michele Castoro, s’interrogeait pourquoi padre Pio avait choisi de passer ainsi beaucoup de temps à confesser. Lui-même donne la réponse :

« A fin que cette parole, la parole de la miséricorde puisse rejoindre le plus grand nombre possible de gens. Il s’est presque épuisé  afin que cette fleuve de miséricorde aboutisse à irriguer la terre aride de tant d’existences » (notre traduction de l’italien).

 

 

Le sacrement de la pénitence a été vraiment le mont sur lequel le gens du monde entier se sont rendus pour recevoir le pardon  du Seigneur par les mains, le cœur, la bouche de son prêtre Padre Pio : car il est le cœur qui accueille, comme celui du père du fils prodigue, la bouche qui donne les paroles du Seigneur pour guérir et donner la nouvelle route, les mains, qui comme celles du père donnent dans le signe de l’absolution nouvelle vie à travers le pardon. Le cœur, la bouche, les mains  sont concernés par le rite liturgique de ce sacrement. Et Padre Pio était là, « prisonnier » dans le confessionnal comme dans le coté ouvert du Christ d’où coulent le sang et l’eau qui nous submergent dans la miséricorde du Père qui attende le fils prodigue.

 

Le phénomène de Padre Pio confesseur croit de plus en plus avec la diffusion de la nouvelle de sa stigmatisation. Nous le savons que cet événement s’est passé six semaines avant que ne prenne fin la Guerre,  le 20 septembre 1918.

La 1re Guerre Mondiale avait frappé des millions de foyers dans toute l’Europe. Les morts et les blessés étaient des foules immenses, les mutilés visibles dans chaque place ou café d’Europe. Mais les blessures intérieures étaient encore plus nombreuses. Et les gens viennent au mont Gargano pour écouter l’homme de Dieu, pour être réconciliés avec Dieu.

En 1919 Padre Pio écrivait à son ancien maître d’école Angelo Caccavo :

 

« Je vais bien, mais je suis surchargé à cause des centaines et des milliers de confessions que j’entends jour et nuit. Je n’ai pas un instant à moi, mais rendons grâce à Dieu qui m’aide efficacement dans mon ministère ». (Ep IV, 702, trad. Bouflet, 53)

 

Il passe la majeure partie de sa journée en écoutant les pénitents. Ils restent dans le petit village, qui au début n’a pas d’hôtels ni des restaurants, des jours et des semaines pour rencontrer Padre Pio. Les supérieurs ont essayé de soulager le frère en envoyant lui  d’autres confesseurs, mais les gens veulent aller uniquement chez lui. Apres la 2me Guerre Mondiale les frères établirent un système d’inscriptions pour ordonner la démarche des fidèles.

 

Padre Pio avait bien compris qu’à travers ce sacrement Dieu lui donnait un pouvoir particulier. Il écrivit au père Benedetto, le 3 juin 1919 :

 

« J’ai n’ai pas une minute libre : tout mon temps est consacré à délier nos frères des rets de satan » (Ep. I,  1145, trad. Bouflet, 55).

 

Dans la même lettre il résiste avec énergie au père spirituel qui lui demande d’écrire à des jeunes frères au nom de la charité :

 

« La charité majeure est d’arracher à Satan les âmes qu’il s’est attachées pour les gagner au Christ » (Ibidem.).

Il avait bien compris sa tâche. Il savait bien la mission que Dieu lui avait donné : « Sanctifie – toi et sanctifie » (Ep. III, p. 1010). Or la sanctification de son peuple, de ses frères, passait à travers le sacrement du pardon comme la vie nouvelle du fils prodigue par l’embrassement du père.

Et il a été ce père, pour les multitudes, renforcé par Dieu pour cette tâche avec des dons extraordinaires. Il avait le pouvoir de scruter les cœurs des pénitents. Il arrachait la masque de ceux qui, parfois, se rendaient chez lui par curiosité : il les expulsait sévèrement et ils retournaient toujours, changés, après l’humiliation, pour recevoir enfin son absolution. Il  découvrait en un instant les péchés cachés de façon volontaire ou involontaire.

Au de-là d’interprétations superficielles, « Ce qui intéressait le padre Pio n’était pas humilier le pécheur en l’écrasant sous le poids de ses misères  – dit notre frère Luciano Lotti -  mais bien de lui faire acquérir sa propre responsabilité face au salut que lui était offert » (L. Lotti, Padre Pio da Pietrelcina : la dimensione pedagogica della riconciliazione in Studi su padre Pio n. 1 gennaio – aprile 2006, p. 142, notre traduction).

 

Il devenait de plus en plus expert des misères humaines, de la dureté terrible du péché, de la résistance de satan dans certaines personnes qui déjà auraient voulu changer de chemin, mais étaient serré par une faiblesse de ténèbre :

 

« La pitié de Dieu à leur égard ne les émeut pas, la perspective des bienfaits d’une bonne confession ne les séduit pas, celles des châtiments ne les ramène pas à la raison. Si l’on montre quelque douceur à leur égard, ils se font insolents, et dès qu’on manifeste quelque rigueur, ils deviennent pervers, et dans l’adversité ils se désespèrent. Et sourds, aveugles, insensibles à tout ce qui pourrait le faire réagir, les plus graves avertissements comme les plus forts exhortations ne font que redoubler les ténèbres dans lesquelles ils se tiennent et endurcissent leurs cœurs. Est-il dureté plus monstrueuse que celle-ci ? » (Ep. I, 645, trad. Bouflet, 54).

 

Dans ce cadre de douleur spirituelle, de ténèbres sur tant de gens, il s’adresse à Dieu sans douter de sa miséricorde :

 

« Que vive à jamais la miséricorde divine ! Comme Jésus est bon envers ses créatures » (Ep. I, 512, trad. Bouflet, 55).

 

Au même temps il « combat » avec Dieu. Il se voit comme Moïse qui intercède pour son peuple idolâtre, qui s’offre victime pour les sauver, il se pose devant les foudres de Dieu avec son corps et tout son cœur. Trois ans après sa stigmatisation il écrit au père Benedetto:

 

« Tout se résume en ceci : je suis dévoré par l’amour de Dieu et celui du prochain. […]Comment est-il possible de voir Dieu attristé par le mal et ne pas s’en attrister aussi ? Voir Dieu sur le point de déchaîner ses foudres, et ne pouvoir pour l’en empêcher, qu’élever une main pour retenir son bras, et tendre l’autre tremblante au frère, pour une double raison : qu’il abandonne le mal et quitte, et vite, le lieu où il est, parce que la main du Juge est pour s’abattre sur lui ? […] Puis pour les frères ? Hélas ! Que de fois pour ne pas dire toujours, je dois dire au Dieu juge, avec Moise : ou pardonne à ce peuple ou efface-moi du livre de la vie ». (Ep. I, 1246, trad. Hommage, 25).

 

La confession d’ailleurs n’était pas seul pour les pécheurs « terribles », mais aussi un instrument de chemin spirituel.  Il exhortait à la fréquence de la confession et de la communion. A une fille spirituelle qui avait le père qui ne croyait pas nécessaire que sa fille se confessait chaque semaine, p. Pio dit : « Tu diras à papa que dans une pièce bien propre et même pas fréquentée, si tu y retournes après huit jours, tu y verras de la poussière ».

 

Un nouveau chemin de réflexion, je pense, a été ouvert par l’étude de mon frère Luciano Lotti, L’epistolario di padre Pio. Una lettura mistagogica, (LEV – Ed. Padre Pio da Pietrelcina, San Giovanni Rotondo 2006). Les “Catéchèses mystagogiques” depuis les temps anciens de l’Eglise constituaient la formation des néophytes, à savoir ceux qui venaient de recevoir le baptême, l’eucharistie et la confirmation. Cette formation passe surtout à travers l’expérience des sacrements du salut et de la nouvelle communion trinitaire dans l’Esprit Saint. Padre Pio a été un prêtre rempli des dons de l’Esprit. Il a vécu l’eucharistie et le sacrement de la réconciliation comme la porte ouverte entre ciel et terre dans le mystère de la Liturgie, du don de Dieu par Jésus, avec Jésus, en Jésus. Le mystère de Dieu en lui se faisait pédagogie sacramentelle et donc expérience de Dieu dans le cœur des fidèles qui s’adressaient à lui. Un confrère, maître d’Ecriture Sainte, le remarquait :

 

« On avait communément l’impression que les confessions faites auprès de lui nous apportaient une aide extrêmement précieuse. Je ne me tromperais pas en définissant cette éducation humaine et religieuse comme éducation sacramentelle, qui relançait notre âme dans le Christ et dans la vie de la  grâce. Sa tâche consistait à intégrer notre nature dans le surnaturel, par la sublimation de celle-ci. Il démontrait par ses paroles et dans les faits, que la vie de l’éducateur et celle de ses disciples doit être ordonné au saint sacrifice. Quelle solennité et quelle action de grâces que les siens, quand il célébrait la sainte Messe ! Et il en exigeait autant de nous pour la sainte communion » (Témoignage du P. Emanuele da San Marco La Catola, cit. Bouflet, 53).

 

 Dans cette année sacerdotale s’ouvre pour nous tous une double invitation :

 

aux fidèles de s’approcher à la Parole de Dieu de toute façon, dans l’intimité du foyer à la Liturgie du dimanche et, participer par elle aux sacrements qui nous nourrissent à tout moment de notre vie : l’eucharistie et la réconciliation ;

aux prêtres de voir leur très haute dignité. La présidence des sacrements signifie avoir la place de Jésus Chef de son corps qui est l’Eglise : un chef qui ouvre à son épouse son côté comme la porte du Paradis (Saint Antoine de Padoue). Chaque prêtre est appelé à se sanctifier en offrant sa même vie avec celle de Jésus.

Enfin le message de padre Pio pour les prêtres est ceci : il n’est pas possible être des prêtres saints … sans s’offrir en victime comme Jésus. A lui de rendre des pauvres pécheurs des victimes parfaites, sanctificateurs de leur peuple.

 

 

 

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE

 

 

Padre Pio da Pietrelcina, Epistolario I. Corrispondenza coi direttori spirituali, a cura di Melchiorre de Pobladura et Alessandro de Ripabottoni, Edizioni Padre Pio da Pietrelcina, III ed., San Giovanni Rotondo 1987.

P. G. Di Flumeri, Hommage à Padre Pio, Editions “Padre Pio da Pietrelcina”, San Giovanni Rotondo, 1984.

A. De Ripabottoni, Padre Pio da Pietrelcina, Profil biographique, Edizioni Padre Pio da Pietrelcina, II ed, san Giovanni Rotondo, 2008.

J. Bouflet, Padre Pio, des foudres du Saint-Office à la splendeur de la vérité, Presses de la Renaissance, Paris, 2002.

G. Di Flumeri, Comme une blessure d’amour, le phénomène de la transverbération chez Padre Pio et Thérèse d’Avila, Edizioni Padre Pio da Pietrelcina, San Giovanni Rotondo, 1992.

L. Lotti, L’epistolario di padre Pio. Una lettura mistagogica, LEV – Ed. Padre Pio da Pietrelcina, San Giovanni Rotondo 2006.

 

 

 

ABREVIATIONS

UTILISEES DANS LES NOTES

 

Epistolario : Ep., avec le numero de volume et la page. On indique chaque foi la source de la traduction et la page.

Hommage : P. G. Di Flumeri, Hommage … o. c.

De Ripa : A. De Ripabottoni, Padre Pio o. c.

Bouflet: J. Bouflet, Padre Pio … o. c.

Blessure : G. Di Flumeri, Comme une blessure … o. c.

 

 

 

 

 

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(Fonte: CONFERENZA ABIDJAN – COTE D'IVOIRE)

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